La Métropole performative ? Echelles de la fabrique métropolitaine rouennaise
Jean Debrie et Xavier Desjardins
La création de la Métropole Rouen Normandie en 2015 a été l’aboutissement d’un processus récent, qui a conduit quatre communautés à fusionner en 2010 pour bâtir une communauté d’agglomération rassemblant soixante-et-onze communes et près de 490 000 habitants. Cela a permis un changement d’échelle dans l’appréhension du territoire et le déploiement de nouvelles politiques publiques. Il s’agit d’examiner ce qui a rendu possible ce processus, comment il s’est déroulé, mais aussi d’en mesurer l’impact, notamment dans les modes de relation avec le tissu productif local et la prise en charge des dynamiques sociales et environnementales.
L’histoire de la structuration intercommunale rouennaise est marquée par une pratique ancienne du dialogue interterritorial. Celui-ci s’est organisé aussi bien entre des communes aujourd’hui intégrées dans la métropole qu’avec des institutions intervenant à d’autres échelles, notamment en Normandie et dans la vallée de la Seine, jusqu’à Paris. Faire l’inventaire de ces relations pour les analyser permet de comprendre à la fois pourquoi et comment elles ont été mises en place, en quoi elles ont rendu possible l’élargissement de la structure intercommunale et ce qu’elles donnent aujourd’hui l’occasion de projeter et de réaliser. Une démarche comparable est menée pour comprendre l’organisation des relations entre les institutions publiques et les acteurs économiques, de façon notamment à observer l’inscription de ces derniers dans les dynamiques locales. Il s’agit ainsi de s’interroger sur la manière dont l’institution « métropole » permet de mieux se saisir des dynamiques de métropolisation, c’est-à-dire des dynamiques économiques, sociales et culturelles liées à l’interdépendance de plus en plus forte entre les territoires.
Le processus de métropolisation renouvelle les questionnements sur l’accès à la mobilité et aux centralités, au moment où des innovations en matière de mobilité et le développement des modes actifs bouleversent perceptions et approches. Ce phénomène est particulièrement prégnant dans la métropole rouennaise, qui concentre étroitesse de la ville-centre, congestion automobile liée notamment à l’absence de contournement urbain, émergence de nouvelles centralités et un écosystème industriel et de recherche performant, porteur de nombreuses innovations en matière de transport à l’image du lancement en 2018 du premier service de mobilité autonome en Europe. L’enjeu est d’interroger les inégalités d’accès aux centralités métropolitaines, la trajectoire de l’action publique locale et l’apport du digital et des mobilités connectées au moyen d’un diagnostic de l’état actuel et d’un exercice prospectif sur les mobilités intelligentes à l’échelle métropolitaine.
En partenariat avec WWF, la Métropole Rouen Nor-mandie engage une démarche visant à la signature fin 2018 des « Accords de Rouen pour le climat ». Au-delà des actions sur son propre patrimoine ou dans le cadre de ses compétences, la métropole anime une dynamique territoriale visant à fédérer acteurs écono-miques et institutionnels, communes et citoyens pour construire leur propre engagement pour le climat. Cette expérimentation est accompagnée par un groupe d’experts constituant un « GIEC local ». L’enjeu n’est pas de prolonger cette expérience, mais de re-venir de façon réflexive sur son déroulement, en parti-culier pour apprécier ses effets sur les politiques publiques et sa capacité à mobiliser la société civile. Cette analyse est complétée par un dispositif d’obser-vation des mutations engagées dans différents sec-teurs économiques à la suite de la mise en place de politiques sectorielles portant sur l’énergie et le climat.
Jean Debrie et Xavier Desjardins
Les entités territoriales sont découpées administrativement en différentes structures qui correspondent à des échelles et des compétences distinctes. Ce maillage administratif ne coïncide pas nécessairement avec ce que l’on identifie comme les bassins de vie, ni avec les espaces vécus par les populations qui les composent. Ce constat amène à envisager les relations que peuvent entretenir ces entités territoriales les unes avec les autres.
Alors que 13 millions de français se disent éloignés du numérique (Ministère Cohésion des territoires, 2019), l’accès au numérique (à internet et ses outils) soulève des enjeux d’inclusion et d’accès aux services ou encore de cohésion, d’attractivité et de développement économique du territoire. Les technologies numériques sont porteuses d’espoir dans le développement des territoires - notamment dans la lutte pour désenclaver et enrichir les territoires ruraux, ou dans la quête d’accélération de la transition énergétique et de la participation citoyenne.
La mobilité - ou plutôt les mobilités - est l’une des notions les plus partagées au sein des sciences sociales, en particulier en géographie, sociologie, aménagement et urbanisme. Définies comme les déplacements de personnes d’un lieu à un autre, les mobilités sont intimement reliées aux choix des modes de transports et à la notion d’accessibilité.
Pour répondre aux enjeux de la transition écologique - ceux du changement climatique, de la rareté des ressources, de la perte accélérée de la biodiversité ou encore de la résilience en réponse aux crises sanitaires environnementales, les villes et territoires mobilisent des leviers divers, que les projets de recherche de la plateforme s’attachent à analyser.