Des jardins dans les metropoles
Mazagran @ PUCA

Mazagran @ PUCA

En 2012, POPSU Europe s’est penchée sur la mutation « Des jardins dans la métropole » et cherché à préciser les nouveaux usages et les pratiques sociales qui se développent dans les jardins d’Amsterdam, Berlin, Bruxelles, Lausanne, Lyon, Nantes, , Strasbourg, Toulouse, et sur les projets du bailleur social Paris OPH Paris habitat.

Définir les usages et les pratiques des jardins dans la métropole est difficile car ce n’est pas un espace vert comme les autres, ni parc, ni espace naturel, ni délaissé urbain, comme il en existe tant. Il peut être public ou privé, ou encore partagé. Son usage est généralement réservé à un individu, une famille, un groupe ou une communauté. Il est en principe clos, mais reste en fait souvent plus ou moins ouvert aux autres, qu’ils soient voisins, amis, invités, ou simples passants. On y pratique, le plus souvent, de nombreuses activités, mais on n’est pas obligé de les faire : jardiner bien sûr, et donc fleurir ou cultiver un potager. On peut y laisser pousser les herbes folles ou au contraire les chasser avec la plus grande énergie, prendre ses repas, jouer, s’y reposer, faire la sieste. Le jardin est un espace polymorphe et ses occupants le revendiquent comme tel.

Jardiner en ville n’est pas un phénomène nouveau. L’histoire des jardins se confond avec celle de l’habitat humain : jardins médiévaux, florentins, à la française, ouvriers, etc… ont ponctué l’histoire des villes et des civilisations urbaines, les ont façonné et en ont marqué le paysage. A chaque époque, les jardins ont donné à l’espace urbain une empreinte spécifique et ont porté des valeurs d’usage qui se fondaient avec l’évolution des cultures et des modes de vie.

Aujourd’hui, la prise de conscience d’un nécessaire aménagement durable renouvelle les liens avec la nature et l’environnement. Le contexte de crises interroge l’essor actuel des jardins et leur place dans la fabrique de la ville contemporaine. Le jardin prend une nouvelle dimension, à la fois sociale, économique et environnementale. Une dimension sociale, car il favorise la cohésion, renforce les échanges et les liens de voisinage, multiplie les activités partagées autour de pratiques qui se veulent simples, conviviales et parfois éducatives. Une dimension économique, car il peut être pensé dans un esprit de production et de consommation vivrière à circuit court permettant le développement d’une économie de subsistance. De plus, en tant qu’espace récréatif et de loisirs de proximité il tend à réduire les désirs de résidences secondaires, d’exotisme campagnard, de voyages dépaysant. Une dimension environnementale enfin, car dans une ville qui cherche à renouer des liens avec la nature et qui conserve en son sein des espaces garants de cette mémoire, le jardin constitue un jalon important pour la préservation de la biodiversité et le développement des écosystèmes. Cette triple caractéristique offre une place de choix aux jardins car elle est transversale aux différentes échelles de la métropole, de la plus petite cellule familiale au grand territoire métropolitain, et aux nombreuses temporalités de la vie urbaine et de ses habitants.

Trois axes thématiques d’observation

9 villes étudiées

Amsterdam / Berlin / Bruxelles / Lyon / Malaga / Nantes / Paris / Strasbourg / Toulouse

Premier axe : Espaces et temporalités du jardin dans la métropole

Le jardin dans le territoire métropolitain

Le jardin est-il devenu un élément d’aménagement du territoire métropolitain ? Comment l’action sur un jardin individuel peut-il avoir un impact sur la grande échelle ; comment permet-il d’articuler échelles de proximité et grandes échelles ? Quels impacts a-t-il sur la fabrique du territoire ? Comment influence-il les dynamiques de renouvellement urbain ? Comment peut-il être pris en compte dans les études d’aménagement, et quelles interactions favorise-t-il entre activités agricoles urbaines et ville territoire ? Quel rôle peut-il jouer en appui des trames vertes, bleues et marrons qui structurent les villes ? Quels sont les statuts juridiques et réglementaires des jardins en milieu urbain et ceux-ci évoluent-ils pour introduire de nouveaux usages ? Quel est le statut de l‘éphémère dans ce contexte ? Quelle est la place du jardin temporaire ? Quelle est la place du collectif et celle de l’individuel dans la logique de jardin partagé.

Le jardin dans le tissu urbain

Le jardin urbain correspond à une forme particulière d’appropriation de l’espace de proximité qu’il contribue à structurer. Aujourd’hui, implanté le long des rues, dans les dents creuses, aux pieds d’immeubles ou dans des tours, en cœur d’ilot ou à la frange des agglomérations, il compose des espaces qui peuvent être publics ou privés, interstitiels, hybrides, intermédiaires, etc. Quels en sont les lieux d’implantation privilégiés ? Comment occupent-ils certains espaces urbains délaissés ? Le jardin est-il créateur de formes urbaines ?  Le jardin en ville, ne doit-il être qu’horizontal, dans quelle mesure peut-il adopter la verticalité ? Quels rôles jouent les extérieurs du logement : balcons, terrasses, toitures, murs végétalisés) ? Quel développement peut-on envisager pour les cultures hors-sol, en toiture ou en cœur d’ilot par exemple ? Quelle place peuvent jouer les jardins dans les friches, les dents creuses, les marges ? Le jardin facilite-t-il des articulations entre l’individuel et collectif ?

Les temporalités du jardin

Qu’il soit lieu éphémère, le temps d’un événement, qu’il se développe dans des espaces de transition ou qu’il soit permanent, le jardin s’inscrit dans des temporalités différentes. Son appropriation par des habitants, ses pratiques et ses usages sont-ils dépendants de temporalités quotidiennes, hebdomadaires, saisonnières et climatiques ? Quelle marge d’expérimentation lui permet cette souplesse ? Alors que le jardin est très souvent considéré comme une installation temporaire d’appropriation d’un lieu par les habitants, comment peut-il être envisagé comme préfiguration de mutations urbaines ?  Est-il créateur de formes urbaines ?

Deuxième axe : le jardin, ses usages et ses usagers

Vivre ensemble dans les jardins

De nombreuses études démontrent que la pratique du jardin favorise un meilleur vivre ensemble. Comment le jardin devient-il un lieu d’animation dans un quartier et comment favorise-t-il des démarches de cohésion par la mixité sociale ? Quel type d’habitants utilise ces espaces ? En particulier, facilite-il une prise en considération des populations les plus vulnérables et démunies ? Comment favorise-il la prise en considération de générations différentes, aux aspirations diverses ? S’agit-il plutôt de pratiques individuelles, ou collectives ? Quels sont les usages partagés ? Quelles opportunités de loisirs offre-t-il ? Quel jardin pour quel usage la nuit ? En quoi est-il aussi un lieu du débat, par une participation citoyenne renforcée ?

Le jardin vivrier pour une économie de la subsistance

Face aux crises actuelles, dans quelle mesure les jardins contribuent-ils à l’économie familiale ? Le jardin en tant qu’auxiliaire de l’économie des ménages apporte une production alimentaire de subsistance. Peut-il également apporter une réponse même partielle au développement d’une agriculture urbaine ? Quelles perspectives offre le développement des jardins aux réflexions actuelles sur l’agriculture urbaine et sur la production/consommation par des circuits courts ? Alors que de nouvelles formes de production agricole émergent en réponses à des besoins alimentaires d’une population urbaine s’appuyant sur ce type d’agriculture, comment cette économie de subsistance répond-elle à la recherche d’une agriculture saisonnière et une alimentation saine ? Quelles formes architecturales et urbaines peuvent être envisagées pour accueillir des jardins partagés ou des toits productifs ? Quelle importance prend le jardin vivrier dans les choix alimentaires, dans les modes de culture, dans les pratiques de jardinage ?

Jardins polymorphes

Le jardinage et la culture potagère ne sont pas les seuls usages du jardin en milieu urbain. Il accueille aujourd’hui, très souvent, de nombreuses activités parmi lesquelles le caractère récréatif, et les loisirs y jouent un rôle essentiel. Ces jardins se construisent comme des espaces polymorphes, ils répondent à des fonctions diverses : convivialité, festif, éducatif, culturel, artistique, .... Le repos y joue un rôle important. Au delà de la sieste, peut-on y passer une nuit et à quelles conditions ? Enfin, comment ces lieux peuvent-ils accueillir des événements sportifs, artistiques, voire des projections vidéos ?

 

Troisième axe : jardins, biodiversité & écosystèmes

La place des jardins dans l’aménagement de la métropole durable

La place des jardins dans les « plans verts » et « plans climats » des métropoles, mais aussi dans les projets d’Aménagement et de Développement Durable (PADD) et les Schémas de Cohérence Territoriale (SCOT), témoigne de la nécessité de renforcer les liens entre l’homme et son environnement. Les jardins, par l’apport de nature qu’ils apportent, contribuent au développement durable de la métropole et par de nombreux aspects à la lutte contre le réchauffement climatique. Ils constituent des relais efficaces pour la protection de la biodiversité, ils contribuent à la régulation des cycles de l’eau par la perméabilité des sols et génèrent des microclimats. Le besoin de nature se transforme progressivement en services rendus et dans cette perspective, le jardin devient un véritable enjeu. Comment tenir compte de la présence de jardins et assurer leur préservation dans une métropole dont l’échelle de réflexion se situe rarement à ce niveau ? Enfin, quelles mesures prendre pour que la gestion des jardins résiste à la pression foncière ?

Des jardins & la biodiversité

Les biotopes présents en ville, par leur diversité, leur fonctionnement, leur organisation et leur répartition, constituent des écosystèmes à l’équilibre fragile. La ville s’apparente à un métabolisme vivant composé de plusieurs biotopes. Quelle attention le jardin permet-il de porter sur le vivant dans la métropole ? Comment les jardins peuvent-ils être pensés pour se faire les supports d’un développement de la biodiversité ? Comment peut-on les intégrer dans une réflexion élargie aux différentes formes d’espaces verts urbains, pour contribuer aux continuités nécessaires de la biodiversité à différentes échelles. Que deviennent les délaissés urbains s’ils sont jardinés de façon extensive ? Quelles relations à l’agriculture urbaine, aux corridors écologiques, aux espaces en gestion différenciées, aux espaces en jachères et aux friches et délaissés urbains ?

La pédagogie des jardins

Le jardin dans la métropole stimule l’imaginaire collectif, et interroge les liens à l’environnement et à la nature. Il est un vecteur de citoyenneté active. Il joue un rôle qui peut être important dans l’éducation à l’environnement, dans la sensibilisation du citadin à une écologie urbaine et à une agriculture locale et de saison. Les jardins peuvent être des lieux de pratiques sociales et d’éducation. Quelle stratégie pédagogique peut répondre à ces enjeux ? Comment le jardin peut-il devenir le reflet des initiatives de sensibilisation des collectivités locales ? Qu’apprend-t-il à voir ? Quelles manifestations s’avèrent-elles les plus efficaces pour le développement de ces initiatives (Rendez vous aux jardins, festival de Chaumont, Lausanne jardins…) ?

Équipes

Equipes

Direction de la plate-forme Popsu
Virginie Bathellier

Direction scientifique du programme
Jean-Jacques Terrin, responsable scientifique
Jean-Baptiste Marie, secrétaire scientifique

Chercheurs et professionnels du programme POPSU Europe « Des jardins dans la métropole »
Bruno Marmiroli, architecte, ADAC - L'atelier
Nicolas Gilsoul, architecte paysagiste
Pascal Amphoux, Professeur à l'Ecole Nationale Supérieure d'Architecture de Nantes (ENSAN), Chercheur au Centre de Recherches sur l’Espace Sonore et l’Environnement Urbain (CRESSON, ENSAG, Grenoble, UMR CNRS
Nathalie Blanc, Directrice de recherche au CNRS